meant to be together (rp7)

Alessya avait rencontré un homme sur un site de rencontres. C’était la première fois qu’elle avait osé s’inscrire sur ce genre de sites, car à l’habitude, elle n’avait jamais eu aucun mal à se trouver des partenaires, mais depuis que Ugo lui avait brisé le cœur, toute l’estime et le peu de confiance qu’elle avait en elle avait été remise en question. Elle s’était dit qu’il valait peut-être mieux pour une fois changer de tactique et se laisser aller à une autre façon de rencontrer les gens.

Elle était tombée sur un jeune homme de vingt-neuf ans qui lui avait beaucoup plu lors de leurs échanges. Il avait l’air sensible, serviable, sympathique, jovial, tout ce qu’elle recherchait chez un homme. Elle avait senti une connexion entre eux, comme elle avait pu le percevoir avec Ugo. Ils s’étaient fait des plans sur la comète, comme s’ils se connaissaient déjà depuis des années. Tout avait été plus facile à distance, sans le moindre regard porté sur le physique. Au moins, Alessya avait eu cette impression qu’on l’avait apprécié pour elle, et pas pour sa plastique. Ca changeait réellement beaucoup de choses. L’attachement était plus puissant, plus profond que s’il n’y avait que le physique en jeu. A son âge, elle recherchait maintenant plus.

Elle s’était bien apprêtée pour l’occasion, ne désirant lire une forme de déception dans le regard de son partenaire d’internet qui la briserait une seconde fois. Elle avait donc pris sa voiture, puis était entrée dans le café où il l’attendait. Le cœur battant, la respiration qui s’accélérait, elle cherchait du regard un homme seul dans la pièce avant de reconnaître… Ugo, non loin d’elle. Elle fronça les sourcils, décontenancée. Le simple fait de le voir réveillait en elle tout le tumulte qu’elle avait essayé d’éteindre.

- Ugo, comme on se retrouve, lança-t-elle en croisant les bras. Tu me suis ou c’est juste une impression ? demanda-t-elle.

Il ne fallait pas qu’elle vienne à s’éterniser avec lui pour ne pas que cet inconnu qu’elle devait rencontrer la croit en couple avec lui, même si bizarrement, ça ne la dérangeait toujours pas. Elle n’était toujours pas guérie d’Ugo.

Alessya ne s’était pas attendue à croiser Ugo une énième fois, comme si partout elle était, il était là lui aussi. La ville n’était pas si grande, mais de là à le voir à chaque coin de rue, c’était plutôt assez fort. Trop fort pour elle qui essayait juste de continuer sa vie. Parce qu’elle avait besoin qu’il y ait autre chose après Ugo, sinon, ça la désespérerait. L’air de rien avec ce jeune homme dont elle ne connaissait pas le prénom, elle avait réussi à faire le ménage dans ses pensées et à complètement expulser Ugo. Et là, le revoir ramenait tout un tas de poussière qu’elle ne voulait pas voir ressurgir. Il faudrait encore faire du ménage.

Elle ne savait pas si elle était heureuse de le retrouver, peinée ou en colère. C’était sûrement un mélange des trois, parce qu’il n’y avait pas de sentiments définis pour décrire ce qu’il lui provoquait. C’était juste un beau bazar, quelque chose de bien à lui, et à personne d’autre. Il était trop compliqué pour elle, et elle était trop compliquée pour lui, il n’y avait aucune possibilité pour qu’un jour, elle puisse se voir inviter par Ugo, surtout depuis qu’elle savait qu’il était en couple.

- Je te suis pas, j’attends quelqu’un moi aussi, répondit-elle en soupirant.

Alessya le regardait écrire un message sur son portable, le coeur lourd, elle aurait tellement aimé être à sa place de cette fille… Mais c’était mieux comme ça. Quelque chose de surement meilleur l’attendait avec ce charmant jeune homme qu’elle s’apprêtait à rencontrer.

Son portable vibra quelques secondes après que Ugo ne lâche son portable. Elle regarda le message qui s’affichait et qui provenait du même pseudo que l’inconnu qu’elle avait contacté : « Tu ne m'as pas oublié j'espère... j'ai hâte de te voir. »

- Est-ce que… Tu te fous de moi ? Demanda-t-elle le regard perdu dans son écran de portable.

Elle lâcha un petit rire nerveux, complètement hébétée par cette réalité qui se dessinait devant elle : C’était Ugo, l’inconnu. Ca ne faisait aucun doute.

- C’est toi le gars que j’ai contacté sur le site de rencontres et que je devais rencontrer aujourd’hui ici ? Demanda-t-elle, hésitante, ayant peur de sa réponse. Tu viens de m’envoyer « Tu ne m'as pas oublié j'espère... j'ai hâte de te voir » par sms.

Et puis, petit à petit, elle se souvint de tous les détails qui lui avaient rappelés Ugo : sa timidité, sa passion pour l’informatique, et en même temps, tout ce qu’elle avait eu du mal à percevoir chez lui comme sa sympathie, son empathie, et sa jovialité.

Alessya ne comprenait plus ce qu’il se passait. Perdue, et dépassée par les événements, elle avait vraiment cru que pour une fois, la roue allait tourner de son côté. Que pour une fois, elle allait rencontrer un homme qui saurait la respecter et l’aimer pour ce qu’elle était vraiment et pas pour cette façade qu’elle dressait continuellement devant elle. Mais c’était trop beau, ce genre de choses n’étaient pas pour elle, il fallait croire, ou alors Ugo était simplement fait pour elle, et elle se devait de l’accepter. Mais c’était trop dur, et surtout impossible à concevoir. Il lui faisait continuellement du mal, et aussi bizarre que cela puisse paraître, cela ne freinait pas Alessya. Ses sentiments pour lui étaient toujours là, tapies dans l’ombre prêts à ressurgir à chaque fois qu’elle daignait le rencontrer, et croiser son regard envoûtant.

C’était aussi douloureux d’être près de lui, que loin, et c’était compliqué de comprendre qu’Ugo avait voulu passer à autre chose, et qu’il lui avait finalement menti, ou alors qu’il trompait sa copine. Parce qu’elle l’avait quand même trouvé sur un site de rencontres, et le respect voulait qu’on ne fasse pas ces choses-là quand on était en couple.

- Pirater ? Non mais sérieusement, je sais à peine installer des mises à jours sur mon ordinateur, leva-t-elle les yeux au ciel.

Elle était tellement novice en informatique qu’elle n’aurait jamais pu aller aussi loin, pas comme lui, en tout cas.

- Je te rassure, le gars à qui j’ai parlé est aux antipodes de toi également, répondit-elle au tac au tac, blessée par sa remarque. J’en conclus que la fille n’était pas ta copine, ou alors, que tu fais ça derrière son dos ? Demanda-t-elle, suspicieuse.

Quelque part, elle étai décue de son comportement si enfantin alors qu’il était quand même plus vieux qu’elle. Alessya avait du mal à le cerner, et c’était surement ça qui l’attirait chez lui.

Cette rencontre était grotesque, tout chez lui l’énervait au plus haut point. Alessya détestait la mauvaise foi, et là, ce qu’il était en train de faire était clairement de cet ordre.

- Mais bien sûr, j’ai que ça à faire, leva-t-elle les yeux au ciel en soupirant.

Exaspérée et déçue, elle n’avait que pour seule envie de quitter ce lieu, et d’oublier ces retrouvailles qui tournaient encore au vinaigre. Elle aurait tellement aimé qu’Ugo soit l’homme avec qui elle avait parlé sur internet que ça lui brisait le cœur. La chute était rude, comme si elle avait sauté du sixième étage d’un immeuble et qu’il ne restait plus aucune vie à l’intérieur de son corps.

Croisant les bras sur sa poitrine, elle se butait à un mur. Il ne voulait même pas lui donner d’explications au sujet du mensonge qu’il lui avait dit, ce qui était insupportable pour elle. Elle était tiraillée entre l’envie de le gifler et celle de l’embrasser.

- T’as raison ça me regarde pas. T’es juste un menteur, c’est déjà suffisant, lança-t-elle froidement.

Elle n’aimait pas juger les gens, mais là, il la provoquait trop. Alors, elle allait rentrer dans son jeu, parce qu’il était inconcevable qu’elle ne vienne à baisser sa garde.

- Oui, je vais m’asseoir, uniquement parce que je veux pas avoir fait ce déplacement pour rien, soupira-t-elle en prenant place en face de lui.

Alessya savait que même si elle ne mentait pas vraiment puisque ce n’était jamais agréable de se déplacer inutilement, une partie d’elle était quand même bien satisfaite de rester à ses côtés. Elle commanda un expresso, en espérant vainement qu’il pouvait y avoir une chance qu’Ugo ne devienne celui d’internet.

- Alors comme ça, tu serais pas contre avoir des enfants avec moi ? Lança-t-elle en souriant en amusé, cherchant à le provoquer.

La colère mélangée à certaine envie de vengeance se traduisait par un désir de provocation.

Alessya l’adorait autant qu’elle le détestait, et le pire, c’est qu’elle adorait le détester. Il était spécial, unique, il savait la mettre dans tous ses états en faisant trois fois rien, et elle n’avait jamais été dans une telle situation. Elle avait bien voulu tourner la page, mais celle-ci ne voulait pas coopérer. Le chapitre Ugo se répétait encore et encore, inlassablement, et Alessya ne s’en lasserait jamais. A son grand désespoir. C’était son point faible, son jardin secret, elle n’avait abordé leur rapprochement à personne, pas même à sa meilleure amie. Parce qu’elle voulait garder ça en elle, garder ça pour elle, comme un trésor qu’elle désirait protéger.

Elle ne pût s’empêcher de sourire quand elle constata qu’il l’invitait. Elle appréciait le geste, il remontait dans son estime après qu’elle ait compris qu’il avait tendance à mentir. Il fallait qu’elle se méfie de lui, elle le savait, mais c’était Ugo. Elle oubliait tout avec lui, et ça, c’était difficile à gérer, parce qu’elle se sentait nue, à découvert, à sa merci à chaque fois qu’elle lui parlait ou qu’elle croisait son regard.

Après qu’elle finisse par choisir un expresso, elle n’avait pu s’empêcher de lui raviver la mémoire sur les messages qu’il lui avait envoyé. Et elle ne s’était pas vraiment attendue à cette réponse. Elle senti son cœur battre plus vite quand il lui fit comprendre qu’il avait pensé ses mots. Elle ressentit une folle envie de l’embrasser là, tout de suite, mais il ne fallait pas qu’elle cède aussi facilement.

- Je dis pas non, non plus. Ni pour les enfants, ni pour le mariage, ajouta-t-elle en souriant légèrement. Tu sais, je pensais ce que j’ai dit. Je le pensais vraiment que je disais que t’étais quelqu’un de génial.

Puis, le serveur apporta la commande, coupant un peu court à cet instant intense. Elle avait du mal à soutenir son regard, parce qu’elle lui avait confié sincèrement ce qu’elle ressentait, même si du coup, tout était un peu mélangé actuellement. C’était plus facile par internet.

Alessya n’avait pas forcément l’habitude de draguer, ce n’était pas son style, c’était plutôt les hommes qui le faisaient pour elle. La blonde se contentait juste de marcher dans le jeu, ou alors, de reculer, mais c’était rare qu’elle vienne à vraiment émettre un compliment à un homme. Pour autant, elle aimait vraiment voir chez Ugo cette étincelle de bonheur au fond de ses yeux quand elle lui avait dit qu’elle le trouvait génial, comme si personne ne lui avait jamais dit des mots de ce type. Elle aimait percevoir son innocence derrière sa nonchalance, son authenticité derrière ses mensonges et son charme envoutant derrière sa simplicité.

Elle souria à son compliment avant de rire légèrement quand il admit que ce n’était pas extraordinaire.

- Tu t’améliores je trouve.

Elle tournait cuillère dans son café comme si ça pouvait détourner son attention d’Ugo et sa beauté magnétique qui l’attirait vraiment trop.

- Ca se passe. Tu as vu, je camouffle plutôt bien le bleu que tu m’as fait à l’œil, souria-t-elle. D’ailleurs, je sais pas si ça peut se dire comme ça, mais je crois que tu me manques… ajouta-t-elle avant de comprendre sa connerie. Comme patient, je veux dire.

Elle but une longue gorgée suite à ça, elle ne comprenait pas pourquoi ça lui avait échappé. La blonde sentie ses joues prendre une teinte rosée. Puis, elle le fixa avec attention quand il lui avoua que cette fameuse blonde était sa sœur. Alessya ne pût s’empêcher d’être soulagée. Alors, ça voulait peut-être dire qu’il était célibataire.

- Pourquoi tu m’as menti ? Demanda-t-elle, ne comprenant pas l’intérêt de ce mensonge.

Les mots la dépassaient complètement, comme si rien ne pouvait traduire ce qu’elle ressentait à l’intérieur. Elle avait toujours trouvé qu’il n’y avait pas assez d’adjectifs pour mettre en forme ce qui pouvait se produire dans sa tête. Et là, c’était le cas. Sa déclaration se passait de mots, comme s’ils devenaient inutiles, futiles et sûrement de trop dans un moment pareil. Ca faisait mal de s’accrocher à lui de cette manière, comme s’il représentait le seul fil qui pouvait l’attacher à l’espoir de se sentir mieux. Et là, contre ses lèvres, elle avait l’impression qu’elle avait trouvé son refuge, son univers, là où personne ne pourrait plus jamais l’atteindre, dans cette espace qui semblait être dans une réalité alternative.

Elle savait qu’elle avait pris un risque, que cette ville était plutôt petite, et que ses patients, ses collègues pouvaient la surprendre dans ce moment plein de romantisme, mais actuellement, elle s’en fichait. Elle se fichait de tout, elle avait juste envie de ses lèvres, de son souffle, encore et encore, comme si tout contre lui, elle reprenait vie.

Très vite, leurs lèvres se détachèrent, la ramenait à la réalité qui était bien compliquée qu’il n’y paraissait.

- Dis moi alors ce que je dois faire… Parce que là tu me demandes de choisir entre mon travail et toi. Je peux plus t’avoir en patient si on continue… souffla-t-elle, le regard triste.

Elle n’avait pas envie de l’abandonner, mais c’était trop compliqué, Alessya avait l’impression qu’un étau se refermait contre elle, la pressant de plus en plus à faire un choix.